57 % des entreprises françaises déploient des cas d'usage d'IA générative depuis plus d'un an, selon l'étude « ROI of AI » de Google Cloud. Impressionnant. Mais que fait réellement la fonction formation de cette technologie, entre promesses des éditeurs et réalité du terrain ?
L’IA générative, une révolution qui oublie (encore) la formation. La France, championne européenne de l’IA ? C’est ce que suggère l’étude « ROI of AI » réalisée pour Google Cloud auprès de 179 dirigeants français. Les chiffres parlent : 57 % des entreprises françaises utilisent l’IA générative depuis plus d’un an, devançant l’Allemagne (45 %) et le Royaume-Uni (39 %). Plus encore, 60 % disposent d’un budget spécifique et 72 % augmentent leurs investissements. Parmi les domaines d’implémentation, la productivité individuelle arrive en tête (61 %), suivie des ventes, du marketing et du service client (57 %).
Quid de la formation ? Curieusement absente du radar de cette étude, qui s’est concentrée sur les dirigeants (CEO, CIO, CFO…) mais a oublié d’interroger les Directions Formation. Une omission révélatrice : quand on parle d’IA générative dans l’entreprise, la formation n’est manifestement pas la priorité qui vient spontanément à l’esprit des décideurs. C’est précisément cette absence qui devrait alerter les responsables formation, pour peu qu’ils ne veuillent pas rester sur le banc de touche pendant que se réorganise la création de valeur dans l’entreprise.
Des cas d’usage encore trop timides. Soyons lucides : les cas d’usage de l’IA générative en formation existent. Conception accélérée de modules, création automatisée de quiz, personnalisation des parcours, tutorat intelligent, analyse fine des données d’apprentissage… la palette est large. Mais combien de services formation ont réellement franchi le pas ? Peu. Ces initiatives restent souvent cantonnées à des expérimentations ou confiées aux équipes IT et digitales, sans réelle appropriation par la fonction formation. Le résultat : un rôle périphérique, rarement moteur.
Une transformation qui exige un nouveau positionnement. La question n’est pas tant technique que culturelle et organisationnelle. L’étude rappelle que la mise en production de cas d’usage IA prend rarement plus de six mois : la complexité n’est donc pas dans l’outil. Elle est dans la capacité du service formation à en piloter le déploiement, à dialoguer avec les directions IT et data, à comprendre les enjeux de gouvernance et de sécurité. L’autonomie totale est illusoire ; en revanche, la collaboration intelligente, fondée sur une compréhension claire des apports et limites de l’IA, est la clé.
Sortir du silence stratégique. Si la formation reste absente du radar des dirigeants, c’est qu’elle ne parle pas encore leur langage. Là où les autres fonctions mettent en avant productivité, expérience client ou optimisation des coûts, la formation continue trop souvent à se présenter sous l’angle de la pédagogie ou de la conformité. Pourtant, l’IA lui offre l’occasion de démontrer sa capacité à créer de la valeur mesurable : réduction des temps de conception, amélioration de l’expérience apprenant, gains de performance opérationnelle. Autant de leviers qu’il lui faut désormais documenter, chiffrer et défendre.
Une fenêtre d’opportunité à saisir maintenant. Les « early adopters » de l’étude allouent déjà la majorité de leurs budgets futurs aux agents IA. Dans quelques mois, les priorités seront figées. Si la fonction formation ne s’impose pas rapidement comme actrice du déploiement de l’IA, elle en subira les choix sans pouvoir les influencer. C’est maintenant que se joue sa légitimité stratégique : savoir identifier des cas d’usage à fort ROI, mesurer leur impact et prouver qu’elle contribue, elle aussi, à la création de valeur de l’entreprise.
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